Pourquoi créer une compagnie ferroviaire ?


Épisode 21 – La surface disponible ne me permet que la circulation de trains courts où les manœuvres prédomineront. Le thème d’une ligne desservant des emprises industrielles permet et justifie la création d’une compagnie ferroviaire qui donnera de la cohérence à l’exploitation future.


Justifier la cohabitation des matériels

Lorsqu’on pratique comme moi le modélisme à l’affect (photo 67 ci-dessous), on se retrouve vite confronté à un problème de cohérences historiques en achetant son matériel roulant. Eh, oui, je le reconnais bien volontiers, j’ai toujours acheté mes engins de traction sur des coups de cœur. Rien de rationnel par définition. On succombe à un modèle pour sa forme atypique, sa livrée attrayante, ses spécificités technologiques et surtout son rapport qualité/prix. Parfois, c’est aussi simplement un onéreux et superbe cadeau d’un être cher. Alors, rapidement, on se pose la question de comment permettre la cohabitation d’engins de tractions ou de matériels tractés qui ne se sont jamais rencontrés, historiquement ou géographiquement, dans la réalité ? On peut toujours s’affranchir de ces réalités, mais le spectateur, même néophyte, ne pourra que constater ces anachronismes qui nuisent à l’harmonie générale et plus encore si le décor est particulièrement soigné.

letraindemanu (67) BR 050 Märklin

Préservation de patrimoines ferroviaires

La solution souvent retenue est de suggérer qu’une association ou un cercle fictif gère du patrimoine ferroviaire historique. Cela permet donc la circulation de matériels anciens, en particulier des locomotives à vapeur, dans un environnement plus ou moins moderne.

L’avantage de cette formule, nonobstant la cohabitation cohérente recherchée pour le spectateur, évite également la patine du matériel concerné afin de lui garder toute la superbe qui lui est due. Option de choix pour le modéliste collectionneur qui peut ainsi justifier du matériel rutilant sans risquer de le décocter par des travaux de patine.

Solution aussi pour le modéliste débutant, aux moyens modestes, ou ne voulant tout simplement pas se lancer dans des patines parfois hasardeuses. On peut en effet tout autant justifier la splendeur d’un bâtiment voyageur en imaginant que ce patrimoine immobilier est également entretenu par la même association, ce BV pouvant alors recevoir un espace musée, inspiré du vrai « Rosny-Rail« , avec des mannequins Preiser en tenue d’époque, un espace billetterie pour les trains spéciaux, et pourquoi pas y associer une placette où des amateurs de voitures anciennes viendraient à se réunir, comme cela existe Esplanade Saint-Louis à Paris. Tout peut y être présenté neuf puisque parfaitement entretenu.

A l’inverse, toujours dans l’esprit de cette conservation de vieux matériels, on peut aussi figurer des installations minimalistes, voire certains bâtiments délabrés, l’association fictive ayant vu fondre ses subventions publiques pour causes budgétaires et axant prioritairement sa trésorerie sur l’entretien du parc roulant.

Mais si cette démarche peut justifier la circulation de convois voyageurs sous la forme de trains touristiques ou historiques remplis de petits Preiser ou Noch nostalgiques, elle reste plus compliquée pour justifier un trafic de marchandises (photo 70 ci-dessous). 

L’uchronie

Pourquoi alors ne pas pratiquer l’uchronie ? L’uchronie est un style littéraire très utilisé en modélisme ferroviaire qui consiste, à partir d’un événement historique ayant réellement existé, à lui attribuer un développement différent. En quelque sorte, on réécrit l’histoire sur une base utopiste et l’on crée un monde parallèle. Dans mon esprit, il va donc falloir permettre la coexistence notamment de matériels roulants qui, tant historiquement que géographiquement, n’ont jamais pu se côtoyer.

Dans ce monde uchronique qu’est mon module, je me plais à imaginer que la Famille Laure Noirt, a acheté avant la Première Guerre la gare de Marcilly et son ancienne halle à marchandises pour y développer son activité de négociant en charbon. La ligne ferroviaire eut à subir les bombardements préparatoires au Débarquement des Alliés en avril 1944. La riche famille Noirt décida alors de reconstruire de nouveaux bâtiments autour de la halle miraculeusement préservée et d’édifier un petit quai avec un simple abri pour remplacer le bâtiment voyageurs disparu.

Les Marcillais furent ravis de cette préservation de la ligne de chemin de fer, d’autant que le dynamisme de la famille Noirt eut pour effet d’induire l’implantation de nouvelles entreprises. Le Conseil départemental décida alors d’investir dans cette nouvelle zone d’activités : une première tranche de travaux permis de dédoubler la voie unique au niveau du quai puis d’ajouter deux nouveaux embranchements pour mieux desservir ce nouveau bassin d’emplois.

L’  » Association pour la préservation de la 050 TA  » fût transformée en société d’économie mixte baptisée  » Compagnie Industrielle et Commerciale  » et se vit confier la gestion de cette ligne entre Jean-Bernard de Bigorre et Sainte-Gisèle-Les-Bourges.

Photo 73 : Synoptique de la ligne de la Compagnie Industrielle et Commerciale. Source : letraindemanu


Ainsi est née la « Compagnie Industrielle et commerciale » pour gérer une cinquantaine de kilomètres de voies – dans une région qu’il me reste à définir en fonction de l’architecture de mes futurs bâtiments – à vocation de dessertes industrielles. La compagnie racheta alors quelques matériels à des sociétés de transports ferroviaires – Cela me permet de justifier tous mes achats futurs quels que soient l’époque ou la compagnie ! – Contractuellement, elle s’engagea à développer la desserte industrielle de proximité en étoffant l’offre de cabotage, à maintenir un service public aux usagers voyageurs en élargissant les plages horaires, et à préserver le patrimoine en entretenant la 050 TA 23 qui était entreposée jusqu’alors dans les locaux de « l’association départementale pour la préservation de la 050 TA 23« . 

Ainsi la CIC s’est-elle vue confier, par le Conseil général voulant redynamiser l’activité économique, la desserte de nombreuses entreprises qui justifient un transport de marchandises de plus en plus conséquent, les liaisons cantonales de voyageurs pour desservir les marchés, foires et salons et son implication dans l’essor touristique avec dessertes saisonnières.

Voila qui devrait justifier la cohabitation de matériels hétéroclites même s’il me faudra affiner cette réflexion au fur et à mesure de l’avancement de mes travaux et de la constitution de mon parc roulant.

Jouer au train

Chacun pratique le modélisme selon ses aspirations. Il y a les contemplatifs qui aiment admirer leurs compositions se dérouler sous leurs yeux. Il faut déjà disposer d’un réseau suffisamment spacieux et de matériels  en conséquence. Pour ce qui me concerne, j’ai toujours eu une forte aspiration pour l’aspect ludique avec une nette préférence pour les manœuvres : « faire mes aiguilles« , gérer ma signalisation, dételer, dispatcher, composer les rames, …

Pour pimenter le jeu, je vais m’inspirer des pratiques de nos amis Anglais et Américains avec leurs « Car cards » depuis 1961. Loco-Revue y a d’ailleurs consacré un article signé de Philippe Cousyn dans le numéro 836 de mars 2017 (photo 74).

Photo 74 :  Extrait de Loco-revue n°836 de mars 2017


L’idée générale est de se confectionner des « fiches wagons » pour chaque matériel tracté, des « fiches locos » pour chaque engin de traction, des « fiches circulation » pour définir des cycles. Un dé permet de faire des tirages au sort sensé représenter les commandes des clients embranchés, un autre tirage au sort pouvant représenter des aléas à gérer : panne d’un engin de traction, indisponibilité d’un wagon, retard d’un train déjà en ligne, vache sur la voie,….

Là encore, il ne s’agit que d’une ligne directrice qu’il conviendra d’affiner au gré des réflexions et des lectures, mais sur laquelle je peux d’ores et déjà m’appuyer pour définir plus précisément le choix de mes industries embranchées – et donc leurs bâtiments et installations – et de la constitution de mon parc tracté.

Notre réseau est un film dont nous avons rédigé le script.

Nous y dirigeons les acteurs que nous avons choisis selon un scénario que nous avons imaginé, dans un décor que nous avons pensé et construit. Nous y insérons tous les effets spéciaux digitaux que nous offrent la technologie moderne, tous les artifices qu’offrent les effets visuels et sonores pour plonger nos spectateurs dans un univers fantastique où se mêlent nostalgie et utopisme. 

Emmanuel

2 commentaires

    1. Tu pourras voir la photo 438 ( Expos > Saint-Mandé > épisode 86) :

      De superbes réseaux à Saint-Mandé 2018

      C’est un réseau N bouclé d’expo présenté par le club de Provins et interractif qui fonctionne avec des cartes-missions, formule semblable mais plus simplifiée pour les jeunes visiteurs.

      Pour un réseau bouclé personnel, il est sans doute préférable de créer un diviseur scénique afin de rompre l’aspect bouclé pour le spectateur. Cela permet aussi la création d’une coulisse pour composer les convois et stocker les wagons. La partie visible y gagne en harmonie visuelle.

      Bonnes reflexions

      Aimé par 1 personne

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