Episode 1 – Concevoir un réseau de modélisme ferroviaire nécessite une réflexion préalable approfondie. De cette étape incontournable dépend la réussite du projet, la maitrise de son budget et surtout évite des erreurs financièrement coûteuses et chronophages.
Ce billet n’a pas la prétention de survoler toutes les problématiques en détails, mais plus d’exposer les critères qui ont retenu mon attention pour dicter mes choix. Car il faut bien se rendre à l’évidence, notre passion devient vite dévorante et il va falloir trouver une succession de compromis pour obtenir un résultat pleinement satisfaisant.
I – Les choix fondamentaux
1° – L’environnement familial
En premier lieu, à défaut d’être célibataire, il va vous falloir recevoir l’assentiment de votre entourage familial. Ne serait-ce que pour définir un bon équilibre pour les critères qui vont suivre. Votre nouveau hobby doit en effet rester un temps de détente partagée et non être une source de conflits.
Trois critères principaux vont influencer voire dicter vos objectifs : L’espace disponible, le budget fixé et le temps consacré à votre passion.
Photo 1 ci-dessus : La locomotive-tender 050 TA 23 (Référence Märklin 37167) est l’exemple-même d’une petite locomotive qui convient à une petite surface. Cet engin digital sonorisé est particulièrement destiné aux services de manœuvres grâce à ses remarquables qualités de roulement. Source : letraindemanu.fr
2° – L’espace disponible
Par espace disponible, il faut entendre la surface occupée par le réseau lui-même bien-sûr. A celle-ci, il convient de prévoir une superficie destinée à la partie « atelier » et aux nombreux espaces de rangement (matériels, outils, revues,…). Ainsi, il apparaît comme une évidence que les choix d’un modéliste propriétaire de son pavillon avec cave ou grenier diffèreront des critères d’un locataire en appartement.
De cette surface disponible va donc découler le choix de l’échelle de réduction et le type de matériel roulant qui pourra circuler sur le réseau en devenir, en sachant que plus on s’oriente sur du matériel contemporain et donc du matériel long comme le Paris-Moscou, plus il vous faudra de place. Même à l’échelle N au 1/160e, une belle gare moderne reste malgré tout gourmande en surface.
Photo 2 ci-dessus : La BB 15021 en tête d’une rame Paris-Moscou au départ de Paris Gare de l’Est. Source : ErebosSan on YouTube
Je n’évoquerai ici que l’échelle que je pratique : Le Ho, au rapport de réduction 1/87e. C’est l’échelle la plus commercialisée et donc qui offre le plus grand choix tant en matériel roulant qu’en produits de décor. C’est aussi celle qui, à mon gout du moins, offre le plus de « présence« , sauf à opter pour le O, au 1/43e bien plus gourmand en superficie.
Une petite surface n’est pourtant pas rédhibitoire et est même un atout pour un débutant. En optant pour du matériel court (loco tender, petit diésel, autorail, wagon à deux essieux,…) et en choisissant bien son thème (ligne à voie unique, annexe traction, zone industrielle,…) on peut concrétiser un bel écrin pour son parc roulant. Ce raisonnement est d’autant plus vrai pour les échelles O voire I.
Pour ma part, vivant en appartement d’un bailleur social, la surface étant contrainte, j’ai opté pour un réseau de type modulaire. Même si le premier module ne répond à aucune norme officielle – et elles sont nombreuses -, ce choix me permettra de vivre ma passion de longues années : Des coulisses amovibles représenteront l’ « ailleurs » et pourront facilement être remplacées par des modules d’extensions par la suite.
3° – Le budget
Le modélisme ferroviaire est un hobby qui a un coût. Comme beaucoup de loisirs d’ailleurs. Il convient de le définir avec sérieux dès la conception pour réussir l’aboutissement de son projet. Rien n’est plus décourageant en effet que de devoir suspendre l’avancement des travaux faute de crédits. Cette notion est toutefois à relativiser : Hormis le budget de démarrage (menuiserie, voie, alimentation, au moins une locomotive et quelques wagons), le développement du réseau va s’étaler sur plusieurs mois, voire plusieurs années.
Depuis l’avènement du « Digital« , les matériels moteurs se voient dotés d’une électronique embarquée qui augmente le prix des modèles : La commande individualisée des locomotives, leur sonorisation et leurs paramétrages personnalisés offrent une nouvelle dimension dont il est dommage de se passer. Pour celui qui souhaite débuter dans ce domaine, il semble préférable de s’orienter d’emblée vers ce type d’alimentation « digitale » d’autant plus si la surface du réseau est petite. Cela sera sans doute moins onéreux que de convertir ultérieurement en « digital » des locomotives initialement en « analogique« .
Pour limiter les frais de démarrage, rien n’empêche d’ailleurs de faire cohabiter un système « Digital » pour la conduite du matériel moteur et l’ « analogique » pour la commande des accessoires (aiguillages, signaux, dételeurs, …) que l’on pourra digitaliser par la suite si le besoin s’en fait sentir.
A noter que le coût n’est pas forcément proportionnel a l’échelle. En effet, le matériel à l’échelle N est presqu’aussi cher que du Ho.
Pour débuter à moindre frais, il y a sans doute lieu de s’orienter d’emblée vers un « coffret de départ » comprenant une centrale digitale d’entrée de gamme, une locomotive digitale (avec ou sans fonctions sonores selon le prix), quelques wagons et les premiers coupons de rails. Ces offres sont généralement plus attractives que l’achat au détail de tous ses composants. Chaque marque en propose plusieurs.
Photo 3 ci-dessus : Un coffret de départ digital proposé par la marque Roco comprenant une locomotive diésel, trois wagons marchandises, une centrale z21 Start, une commande Multimaus et un ovale de voie. Source : internet
4° – Le temps
Le temps que vous pourrez consacrer à votre hobby nécessite d’être pris en compte puisqu’il peut, en partie du moins, compenser un budget contraint. En effet, les constructions personnelles du décor, en lieu et place des kits du commerce, amoindrissent les coûts mais sont plus chronophages. Nonobstant le fait que des bâtiments « faits maison » vous permettront de répondre à vos besoins en fonction de votre plan de voie et de votre thème, ils contribueront à donner une touche unique à votre réseau et surtout vous apporteront la satisfaction supplémentaire d’avoir acquis de nouvelles compétences.
Enfin, il vous faudra faire preuve d’imagination pour recourir le plus souvent au « système D » : Des matériaux naturels (sables, terres,…), des produits de récupération (bois, quincaillerie, produits du quotidien détournés de leur utilisation initiale,…), des matériels de seconde main (bourses d’échanges, internet,…) vous permettront de faire des économies tout en vous offrant promenades et sorties. Y compris en famille. Le temps et l’esprit de débrouillardise sont donc les alliés de votre trésorerie modéliste.
II – Réflexions complémentaires
5° – Notre passion doit rester avant tout un plaisir
Autant le dire de suite, il y a autant d’approches de notre hobby que de pratiquants… et certains de ces derniers sont parfois très sectaires. Il suffit de lire certains forums dédiés à notre passion pour vite s’en rendre compte au travers de commentaires parfois acerbes. Il y a donc lieu de ne jamais oublier un point primordial : Votre pratique doit vous apporter du plaisir ! Et c’est votre plaisir personnel qui prime, même si votre approche n’emporte pas l’adhésion unanime des autres : Chacun réalise son réseau selon ses goûts, ses « coups de cœurs« , ses compétences et surtout… ses moyens financiers !
Fort heureusement, une majorité d’autres contributeurs saura vous apporter moult conseils précieux et vous évitera sans doute des erreurs graves de conséquences. Sachez donc prendre du recul face aux observations des autres contributeurs. Détournez vous des critiques manifestement hautaines et agressives pour vous concentrer sur les appréciations aimables et constructives qui vous permettront de progresser a votre rythme.
Les différents aspects de cette pratique vont vous obliger à aborder d’innombrables domaines de compétences. Et forcément, vous ne les maitrisez pas toutes : La planification, la menuiserie, l’électricité, l’électronique, la construction des décors, la peinture, la patine, mais aussi l’histoire, la géographie… sont autant de facettes qu’il va vous falloir apprendre ou perfectionner. Elles ne s’improvisent pas, elles s’acquièrent.
C’est donc un hobby évolutif et votre pratique, qui peut vous accompagner tout au long d’une vie, va se modifier au fil des ans et de l’expérience que vous allez acquérir. Certains le surnomment le 10e Art. Et c’est un peu vrai puisque le modélisme ferroviaire consiste à édifier un monde matériel à partir d’idées immatérielles grâce à des techniques manuelles.
Ainsi, est-il préférable d’aborder cette pratique par fragmentation. Opter pour la construction de modules vous permettra de vous fixer des objectifs sur une surface réduite et par voie de conséquence un temps plus court – et donc moins décourageant – et de vous essayer à de nouvelles techniques. Une fois achevé, ce premier module pourra toujours être complété d’extensions.
Cette approche vous permet également d’envisager dès le départ la possibilité de déménager vos œuvres : D’une pièce à l’autre de votre logement (en cas de modification de la composition familiale) ou d’un logement à un autre, à une époque ou les mutations professionnelles voire les « accidents de la vie » peuvent vous obliger à déménager. Car rien n’est plus désolant que de devoir détruire le fruit du travail de plusieurs années simplement parce que l’on n’a pas prévu dès le début l’option déménagement.
6° – Conducteur ou aiguilleur ?
Dans le premier cas, vous vous placez dans la position d’un machiniste qui conduit son engin moteur. Grâce à la conduite en digital, vous devrez piloter votre machine et obéir aux ordres de la signalisation rencontrée, signalisation que vous aurez prescrite en fonction des itinéraires à suivre. C’est une approche ludique de notre hobby qui convient très bien à un modéliste disposant d’un petit parc roulant sur une faible surface. Une voie unique secondaire, une petite gare rurale ou une zone industrielle sont des thèmes de réseaux très prisés des modélistes aux superficies contraintes.
Dans le second cas, vous envoyez des trains sur un circuit dont le fonctionnement sera confié en grande partie à des automatismes – analogique, digital ou par PC. Mais cette option nécessite une place bien plus importante en plus de devoir posséder également un parc roulant plus conséquent. Il est certes très plaisant de pouvoir admirer le passage de belles rames en ligne à la condition toutefois de disposer d’une place suffisante. Le simple ovale de voie de 2m x 1m risque de vite vous décevoir, voire de vous dégoûter à jamais d’un hobby pourtant passionnant.
Russian Railways Paris-Moscou à Gare de l’Est
La troisième alternative est une combinaison des deux précédentes : Pendant que certains trains évoluent automatiquement sur une belle ligne de parade, vous pouvez vous concentrer sur des manœuvres en gare marchandises ou au dépôt. Cela va de soit, cette option ne vous sera accessible que lorsque vous aurez déjà quelques années d’expérience, une surface suffisante et un parc roulant plus étoffé. Voilà de belles perspectives.
Vous l’aurez compris, le modélisme ferroviaire est un loisir créatif et surtout évolutif qui pourra vous accompagner tout au long de votre existence. Pour peu que vous sachiez trouver les compromis aux critères exposés, que vous vous fixiez des objectifs réalistes et réalisables, que vous procédiez par étapes, votre hobby vous apportera de nombreuses heures de satisfaction.
Enfin, n’oubliez surtout pas que le modélisme est une école de patience. Chaque étape nécessite réflexion, étude et essais avant d’être validée puis concrétisée. Les échanges préalables avec d’autres modélistes plus expérimentés (forums, associations,…) vous seront d’une aide précieuse.
Rail Expo 2010 1ère Partie – La Roche des Monts – Muratore (GR) – Limousin (PK149)
III – Mes choix
Pour ma part, mes contraintes sont nombreuses :
– Pas de pièce dédiée à mon réseau qui devra être intégré dans le salon familial de mon logement social. Mon choix se porte donc sur un module de L 200 x l 50 cm, sous forme de « showcase« , sorte de scène de théâtre, qui devra être un élément décoratif valorisant la pièce ;
– Qui dit peu de place implique un plan de voies simple sur lesquelles je privilégierai les manœuvres de trains courts (rames de 80 à 90 cm de long). L’exploitation du réseau sera possible grâce à deux coulisses latérales amovibles.
– Un budget particulièrement contraint : Avec une modeste pension d’invalidité, on arrive juste au seuil critique sans dommage pour le budget familial. Heureusement je dispose d’un petit pécule pour la mise de fond (centrale digitale, voie et aiguillages, une locomotive, quelques wagons,…). Ce budget serré devra être compensé par des constructions intégrales du décor.
– Le temps disponible sera mon atout. N’ayant plus d’activité professionnelle, je pourrai consacrer beaucoup de temps à mon hobby en particulier pour la partie décor. Ce temps disponible sera aussi mis à profit pour de longues lectures sur internet : L’expérience des autres me sera fort utile pour éviter des erreurs préjudiciables au budget.
Dans un prochain billet, je vous présenterai la démarche visant à créer ma propre compagnie ferroviaire.
Emmanuel
Très bonne analyse, je souhaite acheter le coffret qui est dans l’article mais je n’ai pas réussi à le trouver
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Merci pour ce commentaire encourageant. Quant au coffret, peut-être n’est-il plus distribué en 2021. Mais il existe sans doute chez Roco (en rails) un coffret de démarrage similaire. Il faut bien savoir qu’en modélisme, les offres sont souvent limitées dans le temps.
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Je partage pleinement
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Excellente analyse pour bien commencer dans le train miniature quelle que soit l’échelle choisie.
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