Un centre de secours pour ma zone industrielle


Épisode 157 – Infirmier de profession, ancien secouriste-actif d’une association agréée de Sécurité civile et ancien sapeur-pompier volontaire, je souhaite reproduire un centre de secours dans mon monde miniature. En l’espèce, il s’agira d’un centre de première intervention, plus adapté à la taille de ma modeste zone industrielle des années 50/60. Revenons sur ce corps de métier souvent représenté sur nos réseaux, son organisation et ses moyens pour mieux restituer leurs activités.


Le terme « sapeur » vient du verbe « saper » qui désigne l’action de « détruire à la base, attaquer les fondations ». Cette étymologie aux origines guerrières est surprenante tant elle est contraire à l’image que nous avons de cette profession que nous considérons, à juste titre, comme altruiste. Pour autant, la « sape » de l’époque, qui consistait à détruire des habitations – en bois – pour éviter la propagation du feu, n’est pas très éloignée des techniques actuelles des pompiers d’outre-Atlantique lors de gigantesques feux de forêt : ils se positionnent en aval du feu pour le contrer par des contre-feux. Dans les deux cas on détruit le combustible avant que le feu l’atteigne.

Au Moyen-âge, une veille urbaine était organisée dans des villes aux habitations très mitoyennes et surtout très inflammables. En cas de sinistre, le feu était combattu par de simples seaux d’eau acheminés par des chaînes humaines. Il faudra attendre le XVIIe siècle pour voir des pompes manuelles d’abord tractées à la main puis par des animaux. Preiser propose différents pompiers de l’époque 1900 [1]. Ils nous seront surtout utiles pour représenter une manifestation à caractère historique.

Photo 1015 : Preiser Ho, pompiers germaniques 1900. Source : letraindemanu.fr

Une organisation initialement communale

Revenons à une époque plus récente, celle qui intéresse la grande majorité des modélistes ferroviaires. Les sapeurs-pompiers étaient initialement organisés en services d’incendie communaux puisque le maire est responsable de la sécurité sur son territoire municipal. Dès 1925, ils avaient soit le statut de personnel civil sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur (Sapeurs-pompiers professionnels, SPP) soit le statut de sapeur-pompier volontaire (SPV). Deux exceptions à cette organisation : Paris (BSPPdepuis 1811 qui couvre quatre départements de l’agglomération parisienne)  [2] et Marseille (BMPM, depuis 1939, alors que le reste du département des Bouches-du-Rhône est sous responsabilité du SDIS 13) [3] [4] qui sont défendues par des corps militaires.

Photo 1016 : La subdivision des sapeurs-pompiers du Plessis-Piquet au début du XXe siècle, photographie de Paul Javelle (collection Christian Gautier). Source : « La Sainte-Barbe, fête des sapeurs-pompiers « , Le Plessis-Robinsson.com

A partir de 1938, un décret permet d’organiser les secours aux niveaux intercommunaux et départementaux, mais il faut attendre 1955 pour qu’apparaissent les services départementaux de protection contre l’incendie. La départementalisation telle que nous la connaissons aujourd’hui existe depuis 1996 [5] avec la création des services départementaux d’incendies et de secours (SDIS). C’est donc assez récent. Cette période à son importance puisqu’elle va influencer l’harmonisation du parc automobile et rationaliser le maillage territorial, même si cette démarche qualitative avait été entamée depuis plusieurs années déjà. Le SDIS de l’Isère présente en cela une chronologie plus exhaustive [6].


Photo 1017 : Incendie dans un camp Rom à Bobigny, commune défendue par !a BSPP, le 25 avril 2013. Source : JENB Productions / letraindemanu.fr

En 2016, 79% des 246 800 sapeurs-pompiers sont des volontaires, 16% sont des professionnels et 5% des militaires (les sapeurs-pompiers des Armées ne sont pas comptabilisés comme personnels de Sécurité civile). Ils suivent tous la même formation de base et les mêmes cursus de spécialisations [7]. Les militaires et professionnels sont salariés de l’état ou des collectivités territoriales. Les volontaires sont eux indemnisés en vacations horaires. Certains volontaires, comme les sapeurs-pompiers de Grièges, dans l’Ain, se désistent de leurs indemnités au profit du budget de fonctionnement de leur CPI. Cela mérite d’être souligné [8].

« Qu’il s’agisse de secours à victimes, qui représentent près de 80% de leurs départs, d’inondations ou d’incendies, ces volontaires sont en première ligne y compris et surtout dans les plus petits villages. Ils sont le premier maillon des secours de proximité ».

Leur engagement est identique et leur abnégation équivalente, parfois au péril de leur vie [9].


Photo 1018 : Morts au feu le 3 novembre 2012. Crédit JENB Productions / letraindemanu.fr

De l’incendie aux secours à victimes

C’est la popularisation de l’automobile et les accidents de la route qui s’en suivirent dans les années 50 qui ont métamorphosé cette profession : De la seule extinction d’incendies, le sapeur-pompier est devenu désormais un technicien polyvalent de l’urgence technologique. L’hécatombe routière a donc élargi les compétences de ce « soldat du feu » en sauveteur omniscient. Ce sont également ces interventions routières qui vont élargir durablement les compétences dans le domaine du  » secours à victimes « .

Le service de santé et de secours médical (SSSM) est légiféré en 1953. A sa création, qui date de deux siècles, il n’avait qu’une vocation interne (évaluations médicales à l’embauche puis périodiques des personnels et premiers secours aux pompiers blessés en intervention) ainsi que le secours aux asphyxiés. Au fil du temps, sa mission s’élargira aux secours aux victimes civiles de tous sinistres.


Photo 1019 : Accident de la route. Source blogautomobile.fr

Le VSAB, véhicule de secours aux asphyxiés et blessés, apparaît en 1954 (il est remplacé depuis 1991 par le VSAV, véhicule de secours et d’assistance aux victimes) et les premiers matériels de désincarcération en 1965. Depuis, les missions de secours à victimes n’ont cessé de progresser pour devenir l’activité prépondérante des sapeurs-pompiers.

Les échelons d’interventions

L’organisation des sapeurs-pompiers repose depuis longtemps sur le maillage du territoire. Chaque ville est défendue par un centre de secours (CS) qui peut être commun à plusieurs municipalités. Dans ce cas, des centres de première intervention complètent localement l’offre opérationnelle, soit en suppléance (moyens du CS déjà engagés) soit en renfort. L’implantation d’un centre de secours et son armement dépendent des contraintes locales : volume de population à protéger, risques locaux (industries y compris sites dits  » Seveso  « , axes routiers, risques aquatiques,…) et les particularités géographiques (zones montagneuses, zones touristiques,…). Il est donc difficile d’établir une liste exhaustive de l’équipement et des effectifs.

Le centre de première intervention (CPI) est l’unité opérationnelle de proximité. Un CPI permet au moins de réaliser un départ en intervention, c’est à dire le départ d’un équipage à bord d’un des véhicules du centre.

Son armement et son effectif sont généralement réduits. De par sa taille, un CPI peut donc être représenté sur tout réseau modèle. A Marcilly-sur-Maulne en Indre-et-Loire, le CPI aujourd’hui disparu de cette bourgade de 250 âmes comprenait, jusque dans les années 90, une Jeep tractant une motopompe remorquable et un GMC servant de fourgon pompe (Photo 1058 ci-contre). Ces matériels, d’origine militaire, étaient remisés dans un simple hangar et l’effectif comprenait une douzaine de pompiers, tous volontaires. De tels véhicules sont reproduits en Ho par REE. [10] et sont très représentatifs des centres de secours en milieu rural d’après-guerre.

Dans un CPI plus contemporain, le bâtiment pourra être plus important, avec trois à quatre stalles accueillant de trois à huit véhicules : au minimum un fourgon incendie premiers secours, un véhicule tous usages, un véhicule de liaison et parfois un VSAB (ou VSAV selon l’époque). Les effectifs sont généralement composés uniquement de SPV. Ces centres modernes sont particulièrement intéressants à reproduire en modélisme de par leur géométrie et leur volume, compatibles avec une construction intégrale. J’y reviendrai ultérieurement.

■ Le centre de secours (CS) : il peut assurer simultanément un départ en mission de lutte contre l’incendie ou un départ en mission de secours à victime et une autre intervention. Il peut donc faire partir au moins deux équipages à bord de deux véhicules.

Son armement permet de faire face à la plupart des missions courantes sur sa zone de compétence et son parc automobile est donc plus conséquent. On y trouve notamment un ou deux VSAV (ou VSAB selon l’époque), un fourgon pompe pour feux urbains, un second fourgon pompe (éventuellement pour feux ruraux ou feux de forêts), un véhicule tous usages, et des véhicules de liaison (pour un officier de garde, un membre du service de santé,…).  Selon le type d’habitats mais aussi les équipements publics ou privés à protéger (maison de retraite, hôpital,…) on peut trouver éventuellement un moyen de secours aérien (véhicule échelle ou nacelle). Un véhicule de secours routier (VSR, FSR) peut compléter cet armement selon les axes routiers à défendre, mais aussi les moyens de transports ferrés (tramway, trains, métro) ainsi que les industries puisque le FSR peut intervenir pour forcer des ouvrants (rideaux de fer,…).

Les effectifs peuvent être composés uniquement de volontaires ou de professionnels renforcés par des volontaires selon l’activité annuelle. Les professionnels de santé (médecins et infirmiers protocolés) sont souvent rattachés à un CS pour compléter localement le dispositif d’aide médicale urgente supervisé par le SAMU.

■ Le centre de secours principal (CSP) : Il peut assurer simultanément un départ en mission de lutte contre l’incendie, deux départs en missions de secours à victimes et une autre intervention. Il peut donc mobiliser quatre équipages avec quatre véhicules au minimum. Outre ses interventions propres sur sa zone de proximité comme tout CS, le CSP supervise plusieurs CS qu’il est donc amené à renforcer, notamment en moyens spécialisés. En cas d’évènement impliquant des secours nombreux, c’est le CSP qui renforcera le CS initial, voire, si besoin, les renforts viendront de l’autre bout du département. Des SDIS limitrophes peuvent également déployer des moyens.  En effet, il ne faut pas altérer le maillage territorial qui doit rester apte à répondre aux activités habituelles malgré un sinistre d’ampleur très mobilisateur.

Le parc automobile du CSP comprend donc plusieurs exemplaires des véhicules déjà vus dans les CS et CPI. En outre, c’est dans les CSP que sont basés les engins de réserves d’air comprimé, les équipes de sauveteurs aquatiques, les pompiers du GRIMP (intervention en milieu périlleux), les unités de lutte contre les pollutions, les équipes NRBC (Nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique), les véhicules de commandement (commandement opérationnel, commandement médical), les postes médicaux avancés, les camions citernes grande capacité, les grues de relevage, les véhicules de sauvetage-déblaiement, …

■ Le SDIS, c’est à dire la direction opérationnelle (y compris le CRA, centre de réception des appels 18) et administrative départementale, est généralement implanté dans l’un des CSP du département, souvent dans la ville-préfecture. A noter que la plateforme de réception des appels peut être commune à plusieurs services selon les protocoles départementaux. Ainsi, dans l’agglomération parisienne les appels 18 / 17 / 112 sont centralisés.

Vous trouverez sur le beau site officiel du SDIS de Dordogne une présentation didactique des différents échelons opérationnels, leurs casernements et leur parc automobile [11]. Il vous permettra de mieux appréhender cet armement pour reproduire le plus fidèlement ces bâtiments incontournables sur nos réseaux.

Le prochain billet vous proposera de mieux connaître les véhicules d’interventions.

Emmanuel.

 Sources :

[1] Pompe hyppomobile Preiser ref 30425 chez Jura Modélisme

[2] site officiel de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris

[3] Site officiel du Bataillon des marins-pompiers de Marseille

[4] Site officiel du SDIS des Bouches-du-Rhône

[5] Loi n° 93-369 du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours, site  Légifrance 

[6] Site officiel du SDIS de l’Isère

[7] Site officiel de l’UES Sapeurs-pompiers de France

[8] Site officiel du CPINI de Grièges

[9] « Dignes-les-Bains : Morts au feu », le blog JENB Productions, 5 novembre 2012

[10] Site officiel REE Modèles 

[11] Site officiel du SDIS de la Dordogne

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